Essai Zero Motorcycles SR ZF11.4
Survoltée !
La Zero Motorcycles SR c’est une moto qui fait finalement beaucoup de bruit, sans en faire. Une électrique capable d’abattre le 0 à 100 en 3,3 secondes et qui promet 220 km d’autonomie, voilà qui est alléchant… Et en pratique, ça pousse !
Zero Motorcycles progresse et continue de boulotter tranquillement son gâteau, celui des motos électriques. Il faut dire que la concurrence se réveille mollement… La Brammo Empulse ? Une arlésienne qui se fait désirer depuis belle lurette. La Voxan Wattman ? Un pur prototype… La Bultaco Rapitan et la Harley Livewire sont dans les cartons, mais n’arriveront pas avant un moment. Bref, les Zero sont, par la force des choses, les seules motos électriques disponibles ! Et depuis leur lancement, elles progressent année après année.
Super Roadster ?
Nous avions essayé l’an passé la version ZF11.4 de la DS, modèle haut sur pattes de la marque, et en étions ressortis avec une impression mitigée. Sourire aux lèvres pour les performances et l’autonomie atteinte, et grosse interrogation quant au tarif exorbitant et à la finition douteuse… En 2014, Zero place la barre un peu plus haut pour ses modèles et nous délivre une version vitaminée de son roadster S, la SR. Comme ses sœurs, cette SR adopte un nouveau train avant, un nouveau frein arrière, une esthétique un peu remaniée et un nouveau poste de pilotage. La fourche inversée passe de 38 mm de diamètre à 43 mm, mais reste confiée au faiseur taïwanais Fast Ace. Elle reste réglable en compression et détente, comme sur le modèle précédent. Le phare reste identique au modèle 2013 (oh, un phare de MT-03 !), comme les clignotants (oh, des clignos de Triumph !), mais l’habillage se prolonge désormais sous le compteur, preuve d’une finition plus soignée.
Une prise 12V peut désormais prendre place à côté du compteur, en option. L’instrumentation, justement, est l’un des points forts de ce nouveau millésime. Auparavant confié à Koso et d’une banalité sans nom, le compteur est désormais distinctif de la machine. Un compteur lisible, élégant avec son éclairage bleuté et plus que complet ! Outre ce nouveau compteur, les commodos sont redessinés et celui de droite intègre désormais la commande des cartographies moteur, auparavant reléguée sur une platine en métal à gauche du compteur. L’habillage latéral évolue lui aussi avec des plastiques qui remontent désormais jusqu’au carénage supérieur et qui forment une prise d’air vers le groupe motopropulseur. Élégance en hausse, finition améliorée… Jusque-là tout va bien. Dans cette robe rouge spécifique, la SR en jette. Les lignes de ce petit roadster n’ont pas laissés insensibles les motards croisés lors de cette semaine d’essai, intrigués par l’absence visuelle de mécanique (moteur, échappement, radiateur…). Assez basse de selle, la SR s’enfourche sans y penser et se démarre…sans s’exprimer !
Y’a du jus, envoie la sauce !
Rien, pas un bruit, pas une secousse ne vient annoncer que l’engin est démarré, exception faite du ballet de l’initialisation du compteur et du petit triangle rouge allumé dans les voyants. Une fois la superbe béquille repliée, un voyant vert indique que tout est opérationnel, dans le silence le plus total. Mode Eco activé pour commencer, une petite rotation de la poignée et zou… On file déjà bien prestement ! Pourtant, ce mode limite le couple à 40 % et bride la vitesse maximum à 115 km/h, avec une régénération au freinage (dès que l’on coupe les watts en fait) maximale. Idéal pour qui veut ménager sa monture, ce mode est déjà tout à fait satisfaisant pour circuler. En ville comme sur route, il faudra toutefois être hyper-vigilant. En effet, la Zero n’est pas parfaitement silencieuse (elle est même bruyante quand il n’y a rien alentour), mais elle ne fait pas le bruit d’un véhicule thermique et peut donc surprendre les autres usagers…
La selle est assez confortable sans être non plus un modèle du genre, les suspensions sont assez souples, le passager est plutôt bien accueilli et le silence est fort reposant. Mais la SR promet des sensations très fortes. Où qu’elles sont ? Son moteur passe de 54 chevaux à 67. Bof ? Oui, c’est la puissance d’une KTM 690 Duke par exemple… Pas impressionnant ? Sachez qu’en parallèle, le couple bondit de 9,38 mkg à 14,7 ! Soit le couple maximal d’une Super Duke 1290… Et pour envoyer, ça envoie ! Mode Sport enclenché, la Zero abat le 0 à 100 km/h en 3,3 secondes et pointe à 160 km/h à peine un peu plus tard ! Le pauvre pneu arrière IRC Roadwinner en 140 de large (pour moins de poids et de résistance au roulement) digère mal la cavalerie et couine à la moindre rotation un peu sèche de la poignée. Un burn involontaire au feu rouge ? Oui, c’est possible, et sur le sec ! Sur le mouillé, il faudra faire preuve de doigté avec un tel engin, et se mettre impérativement sur le mode Eco sous peine de séances de rodéo sauvages. Avec une telle capacité d’accélération, sans bruit, on est vite scotchés. Et les autres usagers aussi ! La SR s’extrait des virages en vous plaquant une sorte de main géante dans le dos… Grisant !
Châssis top, matos flop…
Dommage que la partie-cycle ne suive pas encore tout à fait. Les suspensions Fast Ace, le freinage Nissin à l’avant et J-Juan à l’arrière et les pneus IRC font ce qu’ils peuvent et s’en sortent honnêtement, mais on aimerait avoir quelque chose de plus qualitatif et efficace avec une telle artillerie entre les jambes. Côté suspensions, ce n’est pas l’idéal. Confortables tant que le sol est lisse, elles peinent à filtrer les petites irrégularités. On sent bien que Fast Ace essaye de proposer des éléments convaincants, mais ce haut de gamme taïwanais n’est pas au niveau. Côté freinage, l’avant est tout à fait satisfaisant même si, là encore, on aurait aimé, sinon du radial, au moins un double disque sur cette version sportive. Qui plus est, l’absence de frein moteur oblige à taper dedans assez régulièrement.
Quasi inexistant en Nissin l’an passé, le frein arrière n’est guère plus satisfaisant en J-Juan (du AJP de base…) avec une course nulle, une pédale dure et un feeling désastreux. Et les pneus, on l’a dit, ne sont pas au mieux avec une telle puissance. Grip moyen, retour d’informations tout aussi limité : ce n’est pas top… Dommage car le châssis, lui, est vraiment bien né. Rigide, il permet à la Zero de basculer d’un bloc, aidé en cela par une batterie très lourde offrant un centre de gravité idéalement placé au milieu de la moto. Malgré les reproches que nous faisons à la partie-cycle, la SR reste une moto capable de rentrer très fort en courbe, pour en ressortir comme une balle. Mais au tarif où la Californienne est vendue, l’équipement reste toujours son point faible…
Braquage à la californienne
Tarif ? Aie… Le mot qui fâche… Vous vous en doutez, cette version SR du roadster n’est pas moins chère que la S, loin s’en faut ! Si les versions standard ont perdu 600 € environ par rapport à 2013, à équipement supérieur, cette SR place la barre encre un peu plus haut, à 17 140 € ! Un tarif pour le moins astronomique, mais si la Zero est économique à l’usage… Pas de vidanges, pas de bougies, pas de distribution, pas de liquide de refroidissement : il n’y a guère que le moteur électrique à inspecter. Et bien évidemment les pneus, la fourche et les freins, comme toute moto classique… Les pleins, eux, sont une formalité même s’ils ne sont pas gratuits ! Et ils sont longs, puisqu’il faut près de 8 heures pour recharger une Zero SR vide… Côté autonomie, la SR consomme peu ou prou comme ses sœurs S et DS 11.4, à condition de rester délicat sur l’accélérateur.
En mode Eco, la SR nous annonçait 190 km d’autonomie théorique en roulant normalement (ville, autoroute urbaine entre 90 et 110 km/h et route, sans taper dedans). En mode Sport, cette autonomie peut dégringoler assez vite, voire s’évanouir carrément si vous faites un concours de dragster ! En revanche, il doit être possible d’atteindre les 210/220 kilomètres d’autonomie maximale annoncée par le constructeur, ce qui est finalement très satisfaisant et largement suffisant pour le quotidien. Et pour les plus gourmands, un Power Tank portant l’autonomie théorique à 276 km existe (il s’agit d’un batterie additionnelle prenant la place du petit « coffre »). Mais c’est encore plus cher, puisque cette option coûte 2 400 €…
BILAN
Alors cette Zero SR, une réussite ? Si l’on part du principe que cette SR est la seule moto électrique disponible sur le marché, avec la S et la DS, oui… et non. Oui, car l’autonomie est tout à fait convaincante, les prestations sont honorables (confort, tenue de route), la finition progresse et les performances sont sidérantes ! Non, car l’équipement reste indigne du tarif proposé, sidérant lui aussi. Mais quel plaisir pris à son guidon !
FICHE EXPRESS
NOTES (dans la catégorie)
Finition : | 6/10 |
Équipements : | 7/10 |
Confort : | 8/10 |
Protection : | 7/10 |
Moteur : | 10/10 |
Partie-cycle : | 7/10 |
Budget : | 4/10 |
NOTE GLOBALE
7/10
ON AIME : | ON N’AIME PAS : |
Oh put… ça pousse ! | Le tarif monstrueux |
Défoncer du thermique à l’accélération ! | L’équipement toujours indécent à ce prix |
L’autonomie préservée sur cette SR plus performante | Le frein arrière inexistant |
La finition en progrès | L’absence totale d’aide à l’achat de ce véhicule « propre » |
Par Simon Palatchi, photos BL et SP.